Compléter le Nutri-score par des mentions nutritionnelles spécifiques
Pour informer le consommateur sur les teneurs excessives en calories, sodium, sucres et graisses saturées, ainsi que sur l’ultra-transformation des produits
Pourquoi ?
La prévalence du surpoids et de l’obésité, cinquième cause de mortalité selon l’OMS, constitue un facteur de comorbidité, aggravant les risques létaux liés au Covid-19 et aux maladies vasculaires, cérébrales et cardiaques1. En France, près de 50% des adultes et 17% des enfants sont en surpoids ou obèses2. L’alimentation et notamment la consommation accrue de produits transformés, riches en gras et en sucre, est considérée comme un vecteur majeur de surcharge pondérale. Les différents Plans Nationaux Nutrition Santé (PNNS) identifient l’éducation à l’alimentation comme un levier stratégique majeur de lutte contre la malnutrition, en ciblant en particulier les enfants. La formation et l’information du consommateur sont cruciales pour lui permettre de faire des choix « sains ». Les PNNS contiennent des préconisations en termes d’apports nutritifs : limiter les apports en sel à 5 g par jour ; limiter les apports en glucide à moins de 12,5% des apports énergétiques3 etc. Elles se déclinent également en réglementations par produit. Le Nutri-score, obligatoire à partir de 20214, est l’outil conçu par Santé Publique France pour développer un étiquetage nutritionnel et pour faciliter le choix du consommateur, au regard de la composition des produits. Toutefois, cet étiquetage reste opaque, puisqu’il n’informe pas le consommateur sur le contenu des produits. Nous considérons cette information insuffisante, réductrice, et ne tenant pas compte de l’ultra-transformation des produits. Elle réduit les différents critères nutritionnels à une information unique, faisant obstacle à la bonne compréhension de la lettre utilisée (A, B, C, D ou E).
En complément du Nutri-score, nous préconisons la mise en place de mentions nutritionnelles spécifiques, informant précisément le consommateur sur les teneurs excessives en calories, sodium, sucre et graisses saturées, ainsi qu’une indication d’ultra-transformation. Le modèle chilien semble démontrer l’efficacité de ces mentions, notamment parce qu’elles sont plus facilement comprises par les enfants, et favorisent l’éducation à l’alimentation dès le plus jeune âge. Les bénéfices sanitaires d’une telle mesure sont importants, comme le démontre la diminution de 23,7% des achats de boissons sucrées au Chili5, suite à la mise en œuvre de cette réforme. Nous sommes conscient.e.s que cette réforme pourrait se heurter à une forte opposition de la part de l’industrie agro-alimentaire. Toutefois, l’objectif de la réforme n’est pas d’exclure les produits du marché, mais d’encourager l’industrie à les améliorer, en les rendant plus sains, afin qu’ils répondent aux normes établies.
Comment ?
- Constituer un panel d’experts de la nutrition et de la santé – comme cela a été fait pour l’élaboration du Nutri-score – afin d’identifier les seuils de calories, sodium, sucre et graisses saturées au-delà desquels les produits seront étiquetés. Le Nutri-score étant rendu obligatoire en 2021, les producteurs et transformateurs sont déjà en cours d’adaptation pour produire un portefeuille de produits plus sains.
- Insérer les nouvelles mentions sous la forme de vignettes « Trop riche en gras/sucre/sel/calories », et « Produit ultra- transformé » apposées sous le Nutri-score des produits étiquetés. La couleur des vignettes devra être définie dans l’objectif d’être rendue visible auprès des enfants (symbole, code couleur rouge/vert, etc.).
- En ce qui concerne l’ultra-transformation, nous nous référons à la définition fournie par le système de classification des aliments NOVA approuvé par l’ONU. Les aliments ultra-transformés (du groupe 4) y sont définis comme des formulations d’ingrédients à usage industriel exclusif, généralement créés par une série de techniques et de procédés industriels6.
- Sur le long terme, développer un plaidoyer conséquent au niveau européen pour la mise en place d’un étiquetage ambitieux en la matière.
Sources
(1) Organisation Mondiale de la Santé. (2020). Obésité et surpoids.
URL:https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/obesity-and-overweight
(2) Assurance Maladie. (2019). Surpoids et obésité de l’adulte : définition, causes et risques
URL:https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/surpoids-adulte/definition-causes-risques
(3) Étude Esteban de 2014-2016. Volet Nutrition – Surveillance épidémiologique. (2019). Adéquation aux nouvelles recommandations alimentaires des adultes âgés de 18 à 54 ans vivants en France. Santé Publique France. URL:https://www.santepubliquefrance.fr/content/download/186844/2320242
(4) Gérard M. (2019). L’Assemblée nationale vote l’obligation d’afficher le Nutri-Score sur les publicités pour l’alimentation. Le Monde.
URL:https://www.lemonde.fr/planete/ article/2019/02/22/l-assemblee-nationale-vote-l-obligation-d-afficher-le-nutri-score-sur-les-publicites-pour-l- alimentation_5426950_3244.html
(5) Boseley S. (2020). Chile’s drastic anti-obesity measures cut sugary drink sales by 23%. The Guardian. URL:https://www.theguardian.com/world/2020/feb/11/chiles-drastic-anti-obesity-measures-cut-sugary-drink-sales-by-23